Crise Thaïlande–Cambodge : alerte sur un impact économique majeur

Les économistes ont mis en garde contre les graves conséquences d’une reprise du conflit frontalier entre la Thaïlande et le Cambodge.

Ils ont souligné que les exportations, le tourisme et le marché du travail pourraient en pâtir en raison de la baisse de la consommation.

La Thaïlande a suspendu l’accord de paix avec le Cambodge, signé le 26 octobre 2025 en Malaisie, après l’explosion, le 10 novembre, d’une mine récemment posée sur le territoire thaïlandais, qui a blessé quatre soldats.

L’un d’eux a perdu une jambe — comme six autres militaires thaïlandais lors d’incidents similaires précédents.

Voir : Thaïlande–Cambodge : l’accord de paix suspendu après l’explosion d’une mine

Comme pour les autres incidents, le Cambodge a nié être impliqué et a affirmé que c’étaient des mines datant de la guerre civile cambodgienne, alors que les autorités thaïlandaises soutiennent qu’il s’agit de nouvelles mines posées sur des zones déjà déminées.

Voir : Mines : la Thaïlande accuse, le Cambodge dénie, les preuves accablent

Suite à cela, des échanges de tirs ont été signalés le mercredi 12 novembre par les deux pays, et les autorités ont indiqué qu’il y avait des civils blessés.

Voir : Thaïlande–Cambodge : échange de tirs et explosion, la tension remonte

Exportations thaïlandaises en danger : jusqu’à 130 milliards de bahts perdus

Poonyawat Sreesing, économiste senior au Centre d’information économique (EIC) de la Siam Commercial Bank, a déclaré :

« Environ 130 milliards de bahts d’exportations thaïlandaises vers le Cambodge, soit 1 % du total des expéditions du pays pour l’année prochaine, pourraient être perdus si les tensions à la frontière se prolongent.

Au cours du troisième trimestre, les exportations thaïlandaises vers le Cambodge ont diminué de 43 % par rapport à l’année précédente, le commerce frontalier ayant chuté de près de 100 %, la plupart des expéditions étant effectuées par voie aérienne ou maritime.

Les secteurs de l’emploi et du tourisme pourraient être affectés si les tensions frontalières s’intensifiaient à nouveau après les échanges de tirs entre les troupes des deux camps dans la zone contestée. »

Nuttaporn Triratanasirikul, directrice générale adjointe du Kasikorn Research Center, a déclaré :

« Environ la moitié des exportations thaïlandaises vers le Cambodge représentent 1,6 % du total des expéditions du pays, la moitié de celles-ci ont disparu en raison de la fermeture des frontières entre les deux pays. »

Elle a estimé le préjudice pour le PIB thaïlandais à 100 milliards de bahts, en citant les chiffres du gouvernement.

Un marché du travail fragilisé par le départ des travailleurs cambodgiens

Les tensions ont également un impact direct sur la main-d’œuvre.

L’offre de main-d’œuvre est menacée, car avant le conflit frontalier qui a éclaté au milieu de l’année, jusqu’à 500 000 travailleurs cambodgiens étaient employés en Thaïlande, en particulier dans le secteur agricole, a noté l’EIC.

Un nombre important de ces travailleurs sont ensuite rentrés chez eux.

« Les travailleurs cambodgiens représentaient 1 % du marché du travail thaïlandais.

Le gouvernement a pris des mesures pour apaiser la situation en recherchant des travailleurs dans des pays tels que le Sri Lanka et en prolongeant les visas des migrants originaires de Birmanie, du Vietnam et du Laos », a déclaré M. Poonyawat.

Tourisme et consommation en baisse dans les zones proches du conflit

« Le tourisme dans le sud de la région nord-est pourrait être affecté, car les touristes ont tendance à éviter les zones de conflit », a déclaré Mme Nuttaporn.

« L’ampleur de l’impact économique dépendra de la durée de la récente flambée de violence.

Mais à court terme, le commerce frontalier entre la Thaïlande et le Cambodge, ainsi que les dépenses et la consommation dans les zones touchées, seront considérablement affectés. »

Les négociations commerciales avec les États-Unis se poursuivent malgré les tensions

Ces nouveaux affrontements n’ont pas affecté les négociations commerciales en cours entre la Thaïlande et les États-Unis, a déclaré la ministre du Commerce, Suphajee Suthumpun.

« Les discussions commerciales entre la Thaïlande et les États-Unis progressent bien et ne sont pas affectées par les questions politiques internationales », a-t-elle déclaré.

« Les actions du Cambodge ont violé la déclaration commune et causé des pertes à la Thaïlande.

Notre gouvernement ne peut accepter un tel comportement, et aucun autre gouvernement ne serait susceptible de le tolérer. »

Mme Suphajee a déclaré que les États-Unis comprenaient la situation et ne l’utiliseraient pas comme prétexte pour retarder ou suspendre les négociations commerciales.

Lors de récentes discussions avec le représentant américain au commerce lors de la réunion de l’APEC en Corée du Sud, Washington a réaffirmé son intention de séparer les questions politiques des questions commerciales et reste déterminé à conclure les négociations cette année.

Les États-Unis réaffirment leur confiance dans la Thaïlande comme partenaire économique

Mme Suphajee et le ministre des Finances, Ekniti Nitithanprapas, ont tenu des discussions avec les membres du Conseil commercial États-Unis-ASEAN à la Maison du gouvernement mardi.

« Ils considèrent la Thaïlande comme un acteur clé de la chaîne d’approvisionnement mondiale et un marché à fort potentiel », a-t-elle déclaré.

« Les entreprises américaines ont salué les efforts de la Thaïlande pour promouvoir le commerce par le biais de négociations sur l’accès au marché et un accord de libre-échange. »

Selon Mme Suphajee, le secteur privé américain considère la politique tarifaire comme une opportunité et un défi pour les entreprises américaines, en particulier celles qui ont des bases de production et des chaînes d’approvisionnement en Thaïlande.

Elle a déclaré que ces entreprises américaines considèrent la Thaïlande comme un centre de production essentiel et un partenaire économique stable.

Les deux pays réaffirment leur volonté de résoudre le conflit pacifiquement

La Thaïlande et le Cambodge ont exprimé leur volonté de résoudre pacifiquement leur conflit frontalier, après plusieurs échanges de tirs et une escalade depuis la suspension unilatérale de l’accord de paix par Bangkok.

Le Premier ministre malaisien Anwar Ibrahim, qui s’est entretenu avec Anutin Charnvirakul et Hun Manet, a proposé la médiation de la Malaisie pour relancer les discussions prévues dans le cadre de l’accord de Kuala Lumpur.

Les deux pays ont réaffirmé leur engagement à restaurer la stabilité le long de la frontière, malgré les incidents récents — mines terrestres, fusillades et destructions dans la province de Si Sa Ket.

Cette dynamique diplomatique pourrait atténuer les risques économiques mis en avant par les analystes.

Le conflit s’inscrit dans un différend historique hérité des cartes coloniales, réactivé cette année après plusieurs années d’apaisement depuis les affrontements meurtriers de 2011.

Voir : Thaïlande – Cambodge : les civils sacrifiés pour protéger les centres d’appels ?

Voir aussi :

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Source : Bangkok Post