Centres d’appel frauduleux : la Thaïlande met en cause l’élite cambodgienne

La Thaïlande rompt le silence diplomatique et accuse le Cambodge d’abriter les plus grands réseaux de cybercriminalité de la région.

Alors que des thaïlandais sont kidnappés, torturés, voire tués dans les centres d’appels au Cambodge, et que ces escrocs ruinent de nombreuses familles thaïlandaises, le gouvernement tentait jusqu’à présent de garder une approche diplomatique avec son voisin.

Mais, les derniers événements ont changé la donne.

Rupture diplomatique après la trahison de Hun Sen

Hun Sen, président du Sénat cambodgien et la Première ministre thaïlandaise Paetongtarn Shinawatra.

Suite aux récentes tensions avec le Cambodge, qui ont commencé par un incident à la frontière et qui se sont intensifiées après la récente trahison de Hun Sen, président du Sénat cambodgien, la Thaïlande ne cherche plus à rester diplomate.

Hun Sen a divulgué l’enregistrement d’une conversation privée avec la Première ministre thaïlandaise Paetongtarn Shinawatra, et cet enregistrement a créé des tensions dans le pays qui menace la stabilité politique.

Voir : Une trahison de Hun Sen sème la zizanie en Thaïlande : la coalition éclate

Des observateurs s’étaient demandés si les tensions à la frontière n’avaient pas été déclenché par le Cambodge pour créer une diversion.

Voir : Conflit Thaïlande – Cambodge : une diversion pour les centres d’appels ?

Car un membre de la famille de Hun Sen, Hun To, est soupçonné de blanchiment de fonds provenant de cyberattaques et d’escroqueries en ligne via les centres d’appel.

Voir : Centres d’appel au Cambodge : l’étau se resserre sur la famille de Hun Sen

La Thaïlande pointe le Cambodge comme épicentre de la cybercriminalité

Le ministre de l’Économie numérique et de la Société, Prasert Jantararuangtong. Photo : Bangkok Post

Le ministre de l’Économie numérique et de la Société, Prasert Jantararuangtong, a accusé le Cambodge d’abriter potentiellement les plus grands réseaux de cybercriminalité au monde, soutenus par l’élite au pouvoir.

Prasert a déclaré le jeudi 19 juin que le pays était surveillé en tant que plus grand centre mondial de cybercriminalité transnationale, avec des indications claires que ces activités illicites sont soutenues par l’appareil d’État et des personnalités influentes du pays.

M. Prasert a cité plusieurs rapports, dont celui de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime (ONUDC), qui détaillent les activités des groupes de cybercriminalité, les escroqueries en ligne et les gangs de centres d’appels.

Ces derniers opéreraient ouvertement dans de nombreux endroits près de la frontière entre le Cambodge et la Thaïlande, avec Poipet, en face du district d’Aranyaprathet dans la province de Sa Kaeo, comme base stratégique principale.

Selon lui, cette région est cruciale pour les réseaux criminels qui tentent de s’infiltrer sur les marchés thaïlandais.

Un recul de la fraude après la fermeture des frontières

Des agents gardent une barricade après avoir fermé le poste-frontière de Ban Khlong Luek dans le district d’Aranyaprathet, dans la province de Sa Kaeo, le samedi 7 juin 2025. Photo : Radio Sa Kaeo

M. Prasert a déclaré que les résultats immédiats des opérations de lutte contre la fraude en ligne étaient évidents après la fermeture temporaire des postes-frontières le 7 juin, le nombre de signalements de fraude en ligne étant passé de 1 300 à 900 en une journée.

Bien que les chiffres fluctuent, la tendance générale montre une baisse lorsque des contrôles frontaliers plus stricts sont mis en place et que les Thaïlandais sont empêchés de travailler au Cambodge.

« Ces chiffres montrent clairement que la fermeture des frontières et la coupure de l’électricité et de l’accès à Internet réduisent directement l’ampleur de la cybercriminalité transnationale et de la fraude en ligne.

Bien que ces mesures puissent causer des désagréments à la population, elles se sont avérées très efficaces pour prévenir des pertes financières importantes », a déclaré M. Prasert.

La Thaïlande modernise son arsenal anti-fraude

Pirate informatique. Photo : ORF

Du 1ᵉʳ mars 2022 au 31 mars 2023, 229 000 cas d’escroqueries en ligne ont été signalés dans le pays, entraînant des pertes financières totales de 34 milliards de bahts.

Le gouvernement a lancé le Centre de lutte contre les escroqueries en ligne (AOC) le 1ᵉʳ novembre 2023.

Entre le 1ᵉʳ mars 2024 et mars 2025, les autorités ont traité plus de 1,18 million de cas, gelé plus de 520 000 comptes bancaires et évité des pertes financières supérieures à 19,9 milliards de bahts, soit une réduction de 42 % des dommages.

Par ailleurs, entre le 1ᵉʳ novembre 2023 et le 31 mai 2025, la hotline de l’AOC (1441) a reçu 1,77 million d’appels, ce qui a conduit à la suspension de 680 000 comptes liés à des fraudes.

Les dommages signalés pendant cette période se sont élevés à 29,7 milliards de bahts.

Prasert a ajouté que le gouvernement accélère les efforts dans le cadre de la loi sur la prévention et la répression de la cybercriminalité.

Il s’agit notamment de mesures visant à :

• Réglementer les comptes mules
• Renforcer la vérification de l’identité des expéditeurs de télécommunications (enregistrement du nom de l’expéditeur)
• Suspendre les services de télécommunications utilisés à des fins frauduleuses
• Adopter de nouvelles réglementations ministérielles pour garantir le remboursement des victimes
• Développer une plateforme numérique centralisée pour suivre les cas de cybercriminalité
• Finaliser les protocoles des centres de prévention de la cybercriminalité

Voir aussi :

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Source : Bangkok Post