Visible dans les rues, tolérée dans les faits, mais niée par la loi, la prostitution en Thaïlande illustre un paradoxe juridique profond.
À Pattaya comme ailleurs, l’État persiste à affirmer que ce commerce n’existe pas officiellement, quitte à effacer toute responsabilité lorsque des conflits surviennent.
La prostitution est officiellement illégale en Thaïlande depuis 1960, une position juridique inchangée qui permet à l’État de nier toute responsabilité.
Voir : La prostitution en Thaïlande, ce qu’il faut savoir
Un article du Pattaya Mail :
Pattaya et l’incident qui n’a jamais existé

Sous les palmiers de Pattaya Beach Road, une vie nocturne non officielle se déroule au vu et au su de tous, pourtant légalement définie comme n’existant pas du tout. Photo : Pattaya Mail
Il y a une histoire qu’un des avocats de notre cabinet aime raconter.
Elle suscite toujours un sourire complice, non pas parce qu’elle est drôle, mais parce qu’elle reflète quelque chose de profondément et indéniablement thaïlandais.
Un Indien avait pris rendez-vous pour acheter des services sexuels à une personne qu’il croyait être une femme à Pattaya.
Les conditions avaient été convenues : un prix, un lieu et un accord mutuel.
La rencontre s’est déroulée comme prévu.
Les problèmes ont commencé après, lorsque l’homme a refusé de payer.
Son explication était sans détour :
« Vous êtes transgenre, vous n’êtes pas une vraie femme.
J’ai payé pour une vraie femme. »
Le conflit s’est envenimé.
Les voix se sont élevées.
Finalement, les deux parties se sont retrouvées au poste de police, arrivant séparément en moto-taxi.
L’image peut sembler légèrement comique, mais pour quiconque connaît le paysage juridique thaïlandais, c’était tout à fait courant.
La police a écouté, examiné les faits, puis rendu sa conclusion en une seule phrase définitive :
« En Thaïlande, l’achat et la vente de services sexuels sont illégaux.
Par conséquent, la police ne peut prendre aucune mesure à l’encontre de l’une ou l’autre des parties. »
Et l’affaire en est restée là, pas de paiement, pas de réparation.
Aucune des parties n’a été jugée dans son droit ou dans son tort.
Sur le plan juridique, l’incident lui-même a été considéré comme n’ayant jamais eu lieu.
En 2022, des policiers avaient menacé un touriste étranger, venu se plaindre d’un vol commis par une prostituée, de poursuites pour violation de la loi sur la prostitution.
Voir : Un touriste menacé de poursuite pour avoir violé la loi sur la prostitution en Thaïlande
Un pays où rien n’existe, mais où tout le monde voit

Touristes sur la Walking Street de Pattaya. Photo : Toast to Thailand
Quiconque a déjà marché le long de Pattaya Beach Road, en particulier près de Walking Street, reconnaîtra la contradiction.
Sous les palmiers, des femmes et d’autres personnes qui ne correspondent pas tout à fait aux définitions légales sont assises ou debout, souriant aux touristes et engageant la conversation.
Parfois, ces interactions vont au-delà des banalités.
Dans notre bureau, nous appelons cette partie de la rue, à moitié par plaisanterie, le « Palm Bar ».
Il n’y a pas d’enseigne, pas de licence, pas de reconnaissance officielle, juste des palmiers, des lampadaires et une entente tacite partagée par toutes les personnes présentes.
Légalement, cependant, rien de tout cela n’existe.
La Thaïlande ne reconnaît pas le travail du sexe comme une profession légale.
Il n’y a pas de statut juridique pour les travailleurs du sexe et, par conséquent, d’un point de vue strictement juridique, il n’y a pas de commerce du sexe.
C’est une position techniquement correcte, mais totalement en décalage avec la réalité quotidienne.
Quand la loi choisit de fermer les yeux

Hôtesses devant un gogo bar de Pattaya. Photo : Pattaya Unlimited.
La police thaïlandaise n’est ni naïve ni inconsciente, et le public n’est pas aveugle, tout le monde sait ce qui se passe.
La loi choisit simplement de fermer les yeux, jusqu’à ce qu’elle décide de ne plus le faire.
Ce moment arrive généralement lorsque des plaintes sont déposées, lorsque l’image touristique de la Thaïlande est menacée ou lorsque trop d’étrangers sont impliqués.
C’est alors que les forces de l’ordre interviennent.
Des arrestations sont effectuées, des accusations sont portées, des visas sont annulés.
Les gros titres suivent, ensuite, la pression s’atténue, les palmiers restent, les lampadaires continuent de briller et l’activité qui n’existe officiellement pas revient tranquillement à la vie quotidienne.
Une blague qui ne devrait pas être drôle

Prostituées ladyboys à Pattaya. Photo : The Weird Network/YouTube.
L’histoire de l’Indien et de la femme transgenre fait toujours rire dans notre bureau.
L’un croyait avoir acheté un service, l’autre croyait en avoir fourni un.
L’État, quant à lui, insistait sur le fait que rien ne s’était passé.
Et quand rien ne se passe, personne n’est responsable de quoi que ce soit.
La question à laquelle personne ne veut répondre

Hôtesses dans un bar de Pattaya.
Certains pays choisissent de légaliser le travail du sexe, non pas pour l’approuver, mais pour reconnaître la réalité, préférant la réglementation au déni.
La Thaïlande a choisi une voie différente.
Ce choix relève de la prérogative de l’État, mais tant que la position officielle restera que « la Thaïlande n’a pas de commerce sexuel », alors que des foules continuent de passer devant ces palmiers chaque nuit, une autre vérité doit également être acceptée :
Parfois, les choses que la loi prétend inexistantes sont les réalités les plus visibles de toutes.
Voir aussi :
Thaïlande : le paradoxe d’un tourisme sexuel illégal mais mondialement connu
Appels à la légalisation de la prostitution en Thaïlande
La Thaïlande classée dans le top 10 mondial des travailleurs du sexe
Thaïlande : déçus par le corps d’une prostituée, des touristes appellent la police
Thaïlande : un touriste en fauteuil roulant volé par 3 prostituées à Pattaya
Source : Pattaya Mail
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2 commentaires
Et c’est sans compter sur le côté « corruption » de cet état de choses, corruption venant de policiers envers les établissements nocturnes, bars, karaokés, salons de massages, discothèques qui engagent des prostituées sous le couvert d’emplois de barmaids, masseuses, chanteuses, danseuses ou hôtesses d’accueil, pour que ces établissements leurs versent quelques billets mensuellement en échange d’une « protection » de leurs employé(e)s et d’une immunité pénale en cas de litige avec des touristes étrangers qui eux paieront les pots cassés et devront aussi passer par le tiroir-caisse pour éviter quelques jours dans les cellules d’un commissariat de police ou pire, une inculpation pour « achat de services sexuels »…
La Thaïlande n’est pas à un paradoxe près, mais celui-là est probablement, de par sa spécificité et la publicité dont il bénéficie à l’étranger, un des pans du tourisme international les plus lucratifs au pays du sourire qui ne se limite pas aux lèvres du visage !!!
Cette situation n’est pas l’apanage de la Thaïlande, en France ce n’est guère mieux.