Un abbé vénéré qui aidait autrefois les patients atteints du sida est aujourd’hui au centre du dernier scandale monastique en Thaïlande.
Il est accusé d’avoir orchestré une fraude massive à l’aide de dons d’une valeur potentielle de plusieurs dizaines de milliards de bahts.
C’est un nouveau coup dur pour le bouddhisme thaïlandais, déjà fragilisé par de nombreuses affaires de mœurs et de détournements de fonds.
Voir : Scandale sexuel impliquant des moines : la Thaïlande tente de restaurer la foi
De héros à suspect

Le 26 août 2025, les enquêteurs de police persuadent Luang Pho Alongkot de se défaire de ses habits religieux afin de se défendre contre les accusations qu’il nie.
Cette fois, c’est Luang Pho Alongkot, un abbé longtemps célébré pour son engagement auprès des malades du sida, qui se retrouve accusé de fraude colossale.
L’ancien abbé du Wat Phra Baht Nam Phu dans la province de Lopburi, s’est forgé une réputation en 1992 en ouvrant ce temple comme refuge pour les patients atteints du VIH/sida au début de l’épidémie en Thaïlande.
À une époque où la discrimination était omniprésente et les traitements limités, son temple est devenu un sanctuaire qui a attiré l’attention des médias nationaux et des dons massifs.
Mais le 26 août 2025, ce parcours de 32 ans a pris fin de manière dramatique.
Alongkot a été défroqué et accusé de blanchiment d’argent aux côtés du célèbre médium « Docteur Bee » (Seksan Sapsuksakul).
Tous deux sont toujours en détention dans l’attente d’une décision concernant leur libération sous caution.
Une mise en scène élaborée pour tromper les donateurs

Luang Pho Alongkot reçoit l’aumône avec le docteur Bee assis à ses côtés au complexe gouvernemental de Chaeng Watthana, le 20 février 2019.
Le colonel de police Charoenkiat Pankaew, qui dirige l’enquête, qualifie ce stratagème d’« Alongkot le drame », une mise en scène élaborée destinée à tromper les donateurs.
« Si le temple a véritablement aidé les patients au début, avec l’apparition des traitements contre le sida et la baisse des coûts médicaux, les dons ont paradoxalement augmenté », explique-t-il.
« Les soins aux patients n’étaient pratiquement plus nécessaires, mais chaque appel aux dons prétendait aider les patients. »
Les enquêteurs pensent que le réseau fonctionnait comme une entreprise, les responsables collectant et gérant systématiquement les fonds via plusieurs canaux.
Les dommages pourraient atteindre plusieurs dizaines de milliards de bahts sur plusieurs années.
Une vie fondée sur des mensonges

Le moine Alongkot juste défroqué avec la police au Bureau central d’enquête à Bangkok, en Thaïlande, le mardi 26 août 2025. Photo : Police du Bureau central d’enquête (CIB)
Le vrai nom du moine était Kriangkrai Phetkaew, mais il avait usurpé l’identité complète d’un camarade de classe décédé, Alongkot Polmuk, utilisant non seulement le nom de son ami, mais aussi celui de ses parents pour ouvrir des comptes bancaires au nom de la fondation.
Voir aussi à propos usurpation d’identité en Thaïlande : Choc en Thaïlande, une star féminine des réseaux sociaux était en fait un homme
Ses impressionnantes références étaient entièrement fabriquées : il n’était pas diplômé de la prestigieuse école Debsirin, ni de l’université Kasetsart, ni titulaire d’un master en ingénierie obtenu en Australie.
Il a avoué n’avoir jamais terminé ses études professionnelles et avoir fui le service militaire pour se réfugier en Malaisie avant de revenir se faire ordonner moine, prévoyant à l’origine de ne porter la robe que temporairement.
Luang Pho Alongkot a été abbé du Wat Phra Baht Nam Phu dans la province de Lopburi pendant 32 ans, inventant une grande partie de son histoire personnelle.
Le rôle du médium

Le moine Luang Pho Alongkot avec le Docteur Bee, medium.
La chute a commencé avec « Docteur Bee », qui a exploité la réputation du temple pour collecter des fonds à son propre profit.
Les initiés du temple ont commencé à avoir des soupçons lorsque des dons en espèces ont mystérieusement disparu, coïncidant avec la construction d’une nouvelle maison somptueuse par Docteur Bee.
Ces informations internes ont conduit à une enquête majeure qui s’est étendue à environ 30 membres du réseau travaillant avec l’ancien moine.
Chaos systématique

Temple bouddhiste Phra Baht Nam Phu. Photo : Swabhava Wordpress
La Commission nationale anti-corruption n’a trouvé aucun système de gestion financière approprié, malgré des fonds facilement obtenus.
Les responsables du temple n’ont pas pu rendre compte du nombre de comptes bancaires ni expliquer comment l’argent avait été utilisé pour souscrire des assurances ou créer des sociétés.
Un ancien patient a effectué des retraits dépassant 300 millions de bahts en cinq ans.
Quelqu’un a obtenu sans difficulté 100 millions de bahts du moine pour acheter un hélicoptère.
Conséquences actuelles

Le scandale touche 120 personnes qui vivent encore au temple, dont 60 patients en phase terminale nécessitant des soins à temps plein.
Parallèlement, l’affaire a donné lieu à des réformes systématiques :
- Le ministère du Revenu exigera des systèmes de dons électroniques (e-Donation) pour les déductions fiscales à partir de janvier 2026.
- Les certificats de mérite traditionnels manuscrits ne seront plus valables à des fins fiscales.
- Les organisations ont révoqué les distinctions précédemment accordées à Alongkot.
- Les autorités éducatives ont supprimé les passages le louant dans les manuels scolaires de 5e année.
Une vision plus large

Entrée du temple bouddhiste Phra Baht Nam Phu. Photo : Swabhava Wordpress
Cette affaire représente plus qu’un simple cas de corruption individuelle : elle met en évidence les faiblesses du système de dons aux temples en Thaïlande et la facilité avec laquelle la compassion du public peut être exploitée.
Alors que l’enquête se poursuit, les autorités espèrent montrer l’exemple afin de dissuader la mise en place de stratagèmes similaires dans les milliers de temples que compte la Thaïlande.
Cet homme, autrefois célébré comme le sauveur des patients atteints du sida, est aujourd’hui un exemple édifiant du potentiel sombre qui se cache derrière les robes sacrées et les façades caritatives.
Voir aussi :
Thaïlande : arrestation de la femme qui a séduit et fait chanter des moines
Scandale sexuel en Thaïlande : une femme a piégé des moines influents
Thaïlande : 3 moines punis après leur virée dans le quartier chaud de Pattaya
Un moine toxicomane et armé arrêté après avoir semé la terreur en Thaïlande
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Source : Khaosod English
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6 commentaires
Les religions : un business plan bien rodé
Qu’on parle du catholicisme, de l’islam ou même du bouddhisme, la logique est souvent la même : l’argent circule, et beaucoup !
Derrière le discours spirituel se cache une organisation qui fonctionne comme une véritable entreprise.
Les fidèles donnent, les institutions encaissent, et là où il y a de grosses sommes, les convoitises ne sont jamais loin.
Les scandales financiers qui éclatent régulièrement dans différentes religions en sont la preuve : l’argent attire les profiteurs, et les querelles de partage des bénéfices ne sont jamais très éloignées.
En Thaïlande, le paradoxe est frappant.
Pendant des années, certains abus sont tolérés, ignorés, comme si personne ne voulait voir.
Puis, tout à coup, des affaires éclatent au grand jour : on découvre des moines pris dans des scandales de corruption ou de fraude, après des décennies de silence.
Les temples, qui devraient être avant tout des lieux de méditation et de recueillement, affichent parfois en priorité leurs caisses à dons, mises bien en évidence.
La religion, censée guider les âmes, devient alors un marché.
Et quand la spiritualité se transforme en commerce, c’est la foi des fidèles qui, au final, se trouve trahie.
Rien à dire de plus, Gaspard, vous avez très bien résumé la situation et le statut de certains moines bouddhistes thaïlandais…
Il ne reste plus qu’à dérouler de grandes banderoles publicitaires à l’entrée de certains temples dirigés par cette catégorie de moines « capitalistes » : « VOUS VOULEZ DEVENIR RICHES ? DEVENEZ MOINE ICI » !!!
Il y a bien longtemps, j’avais pris l’initiative d’aller voir ce fameux temple et je découvris avec stupeur un véritable cirque humain qui mettait en scène l’agonie de pauvres malheureux atteints du SIDA pour collecter de l’argent.
Il y avait des bus qui débarquaient avec une foule de curieux qui venaient se faire peur face à la mort de tous ces mourants.
La visite se terminait avec le passage obligatoire pour verser son obole.
Pas de moine pour accompagner tous ces agonisants qui finissaient leurs derniers jours photographiés par des curieux peu soucieux de la souffrance humaine.
Je croyais découvrir un lieu de bienveillance et de solidarité, mais ce fut un véritable choc de voir toute cette mise en scène de la souffrance et de la misère humaine pour faire du fric.
Il y aura fallu plus de 20 ans (si ce n’est pas 30 ans) pour que cette immonde cirque humain soit dénoncé par les médias.
Un moine en plus, il ce dit bouddhiste, mais bon, il a l’air de ne pas trop s’inquiéter, il a le sourire, c’est qu’il a un bon moral.
C’est ça aussi la Thaïlande, comme l’autre jour, j’ai vu une personne qui a perdu toute sa maison, mais il a sauvé son téléviseur et il avait lui aussi un grand sourire, donc le téléviseur doit être plus important que la maison.
La ou les religions, l’opium du peuple > qui avait dit cela ?
Enfin, c’est surtout que cela est détourné, enfin le pognon lui est parfois détourné.
Et les guerres de religions ?
Moi qui croyais À tout ça ????.
Et que même un jour, je m’y rendrai pour y faire un don, car autour de moi, j’ai perdu des êtres chers de cette maladie, mais quelle mise en scène, je trouve ça au dieu que certains se servent d’une religion et de la misère des gens pour s’enrichir.
Qu’ils aillent en enfer.