Selon le dernier rapport du FMI, la Thaïlande affiche la croissance économique la plus faible d’Asie du Sud-Est, avec seulement 1,6 % prévue pour 2026.
En recul face à ses voisins, le royaume voit sa dette s’alourdir, son système bancaire s’affaiblir et sa compétitivité industrielle s’éroder.
Une situation qui lui vaut désormais le surnom inquiétant d’« homme malade de l’ASEAN ».
Un article de Chartchai Parasuk, PhD, économiste indépendant (les sous-titres ont été ajoutés pour rendre la lecture plus agréable).
Cet article s’inspire du rapport « Perspectives économiques mondiales » (WEO) publié en octobre par le Fonds monétaire international (FMI).
Comme à son habitude, l’organisation a procédé à une analyse trimestrielle de l’économie mondiale, incluant les prévisions de croissance du PIB pour les pays membres.
Le FMI alerte sur la faiblesse de la croissance thaïlandaise

Siège du Fonds monétaire international (FMI) à Washington, D.C., aux États-Unis.
Certaines de ces projections m’ont surpris, car la croissance prévue du PIB de la Thaïlande pour 2026 est la plus faible parmi les 10 pays membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ASEAN) et la deuxième plus faible (1,6 %) en Asie après le Japon (0,6 %).
Nous savons que la situation n’est pas brillante en Thaïlande, mais suggérer que la croissance du PIB sera inférieure à celle de Birmanie (3,0 %), du Laos (2,5 %) et du Cambodge (4,0 %), surtout avec un écart aussi important, est non seulement probablement inexact, mais aussi insultant.
Le FMI prévoit une croissance du PIB de 2,0 % pour le royaume cette année.
Si les lecteurs ne se sentent pas gênés par ce point, veuillez consulter le tableau ci-joint.

Annexe Tableau 1.1.2. Économies d’Asie et du Pacifique : PIB réel, prix à la consommation, balance courante et chômage (Variation annuelle en pourcentage, sauf indication contraire). Source : Rapport du FMI « Perspectives économiques mondiales » (WEO » d’octobre 2025
Le titre de cet article, « La Thaïlande est désormais le « malade de l’ASEAN » », est en réalité très loin de la vérité.
Néanmoins, la situation est mauvaise.
Cet article souligne tout de même que l’économie est dans un état comateux et a besoin d’un redressement urgent.
La propagande politique et les petites mesures ne suffiront pas.
Les décideurs politiques doivent cesser de rêver qu’il existe des solutions faciles.
Les solutions seront non seulement difficiles, mais aussi douloureuses.
Pour trouver un bon exemple de solutions douloureuses permettant de redresser l’économie, nous pouvons nous tourner vers l’Argentine.
Ce pays était auparavant en proie à une inflation de plus de 200 % qui a mutilé son économie.
Le peso argentin a même perdu 45 % de sa valeur en un an.
Même le FMI a abandonné tout espoir de contrôler le niveau d’inflation galopante dans ce pays.
Le nouveau président Javier Milei a accompli un véritable miracle en ramenant l’inflation à 30 %.
Beaucoup pensaient que ses coupes budgétaires hostiles de 30 % et ses réformes massives du marché lui coûteraient son avenir politique.
Au contraire, son parti a remporté la majorité des sièges dans les deux chambres lors des élections de mi-mandat de la semaine dernière.
Mais malgré la douleur aiguë, les Argentins ont ressenti les bienfaits d’une faible inflation après son arrivée au pouvoir.
Bien sûr, tout le monde n’est pas satisfait, car certaines mesures sont effectivement douloureuses.
Les retraités manifestent dans les rues depuis des semaines.
Quelles solutions pour sortir du coma économique ?

L’économie thaïlandaise en difficulté. Photo : The Nation Thailand
Comme je l’ai dit, pour mener à bien cette tâche, aucune solution simpliste ne fera l’affaire.
À l’origine, j’avais l’intention d’écrire trois sections complètes dans cet article.
La première décrirait les crises qui font que l’économie thaïlandaise est qualifiée de « malade de l’ASEAN ».
La deuxième traiterait des conséquences de ces crises.
Et la dernière partie proposerait certaines solutions douloureuses pour atténuer les crises.
Mais en raison de contraintes d’espace, seule la première partie sera expliquée ici.
Je vais toutefois m’efforcer d’intégrer certaines des conséquences et des solutions proposées.
Une croissance du PIB à la traîne jusqu’en 2030

Passants dans une rue commerçante de Thaïlande.
La première crise est celle de la faible croissance du PIB.
Ce n’est pas seulement pour cette année ou l’année prochaine que la croissance du PIB de la Thaïlande est classée au dernier rang de la région.
Les lecteurs peuvent jeter un coup d’œil au tableau une fois de plus.
Je crains que la Thaïlande ne reste en bas du tableau au moins jusqu’en 2030.
Le FMI ne le dit pas explicitement, mais on peut déduire du rapport « Perspectives de l’économie mondiale » (WEO) du FMI pour octobre que, de 2025 à 2030, le taux de croissance nominal moyen du PIB de la Thaïlande s’établira à 2,8 %.
Le taux de croissance réel du PIB ne sera probablement que de 1,8 %, soit le plus bas parmi les principales économies de l’ASEAN.
D’ici 2030, selon ce rapport, la Thaïlande devrait passer de la troisième à la cinquième place parmi les économies de l’ASEAN.
Par simple curiosité, je me demande quels sont les chiffres moyens de croissance (nominale) du PIB à long terme de nos homologues de l’ASEAN au cours de cette période de cinq ans.
Voyons voir.
Il est de 8,5 % pour les Philippines, 7,3 % pour l’Indonésie, 6,3 % pour le Vietnam, 6,0 % pour la Malaisie et 4,3 % pour Singapour.
Pour l’honneur de notre pays, je répète que la croissance moyenne (prévue) du PIB nominal de la Thaïlande est de 2,8 %.
Dette record et banques “zombies” : un cercle vicieux économique

Passants devant des distributeurs automatiques de billets (DAB). Photo : Thai PBS World
La Thaïlande affiche peut-être une faible croissance du PIB, mais notre dette est certainement élevée.
En fait, le niveau élevé de la dette (irrecouvrable) est la deuxième crise économique du pays.
La dette des ménages thaïlandais par rapport au PIB se classe au septième rang mondial (88,2 %), devant Hong Kong (87,8 %), la Norvège (87,4 %) et le Danemark (84,8 %).
Mais devinez quoi ?
Ces pays ont des niveaux élevés de dette des ménages parce que les prix de l’immobilier y sont extrêmement élevés.
Si l’on déduit les prêts hypothécaires, les autres prêts à la consommation représentent moins de 5 % du PIB.
Par conséquent, la dette des ménages ne constitue jamais une menace pour ces économies.
En revanche, la Thaïlande a 60 % de son PIB consacré à la dette non hypothécaire, ce qui est beaucoup trop élevé pour que les débiteurs thaïlandais puissent la rembourser.
J’ai calculé la croissance du PIB, c’est-à-dire la croissance des revenus, dont la Thaïlande a besoin pour pouvoir couvrir les intérêts de sa dette existante.
Il s’agit uniquement des obligations liées aux taux d’intérêt, sans remboursement du principal.
Avec un taux d’intérêt de 3 % pour les prêts, une croissance du PIB de 4,8 % est nécessaire.
Si ce taux passe à 4 %, une croissance du PIB de 6,4 % serait nécessaire.
Il va sans dire que la Thaïlande ne pourrait jamais atteindre une telle croissance du PIB, ce qui signifie que le problème des prêts non performants (PNP) est théoriquement insoluble.
Compte tenu du calcul ci-dessus, les emprunteurs thaïlandais auraient dû faire défaut « en masse », entraînant l’effondrement du système bancaire national.
C’est ce qu’ils ont fait, mais toutes les parties concernées, y compris la Banque de Thaïlande (BoT), ont contribué à dissimuler les chiffres.
Selon un rapport de la BoT, les NPL dans le secteur privé ne représentent que 2,83 %.
De qui se moque-t-on ?
Le taux réel des NPL devrait être bien supérieur à 20 %.
Avant que les prêts ne soient classés comme NPL, les banques restructurent ceux qui sont en train de devenir mauvais pour en faire de bons prêts.
Cette pratique trompeuse cache le problème au public, mais ne peut le cacher aux banques.
Comme il y a moins de bons clients, le système bancaire thaïlandais a connu une croissance négative des prêts pendant 15 mois consécutifs.
Les banques sont en effet des zombies.
Que se passe-t-il lorsque de moins en moins d’argent entre dans le système économique ?
La réponse se trouve dans le tableau, et le cercle vicieux de la faible croissance et des créances douteuses commence.
Donc, si quelqu’un me demande si l’économie va toucher le fond en 2026, je répondrais que non, tant que le problème des prêts non performants n’aura pas été résolu et que le système bancaire zombie n’aura pas été redressé.
Pour résoudre ces problèmes, quelqu’un doit améliorer la « capacité de paiement » de l’emprunteur.
La restructuration fictive de la dette est contre-productive.
Lorsque les clients commenceront à rembourser régulièrement leurs dettes, les banques sortiront « comme par magie » de leur état zombie et redeviendront des acteurs actifs de l’économie.
Un modèle industriel obsolète face à la montée technologique régionale

Travailleurs dans une usine. Photo : ASEAN Now.
La dernière crise concerne la compétitivité.
Le système industriel thaïlandais ne génère pas suffisamment de revenus pour stimuler la croissance et rembourser toutes les dettes.
Si nous voulons avoir des revenus équivalents à ceux des Malaisiens, qui bénéficient d’un revenu par habitant presque deux fois plus élevé, nous avons besoin de produits à forte valeur ajoutée comme les leurs.
Tout cela indique qu’il faut passer à un système industriel basé sur les STEM (sciences, technologie, ingénierie et mathématiques).
Existe-t-il une formule miracle pour obtenir des résultats rapides ?
Non.
Il faudrait 20 ans pour mettre en place une base de connaissances favorable aux STEM, car la Thaïlande devrait réformer l’ensemble de son système éducatif.
- Le FMI prévoit pour 2026 une croissance du PIB thaïlandais de seulement 1,6 %, la plus faible d’Asie du Sud-Est.
- Le pays fait face à trois crises majeures : croissance en berne, endettement élevé et perte de compétitivité industrielle.
- La Banque de Thaïlande masque partiellement l’ampleur des prêts non performants, aggravant la fragilité du système bancaire.
- Chartchai Parasuk appelle à des réformes structurelles profondes et douloureuses, sur le modèle des mesures de redressement appliquées en Argentine.
Voir aussi :
L’économie du bien-être en Thaïlande dépasse les 670 milliards de bahts
L’économie de la Thaïlande « au bord du précipice »
Le nouveau plan de la Thaïlande pour la relance du tourisme et de l’économie
Crise en Thaïlande : Anutin peut-il relancer l’économie en quatre mois ?
L’économie de la Thaïlande connaît une croissance prolongée en forme de K
Source : Bangkok Post
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4 commentaires
L’analyse (partielle dans cet article) de Chartchai Parasukme semble effectivement bien pessimiste et le chiffre d’une croissance du PIB limitée à 1,6 % sera, s’il est confirmé, une pilule excessivement difficile à avaler pour l’économie thailandaise…
Il n’en est pas moins que la situation économique thaïlandaise est très préoccupante et que ses aspects les plus négatifs pèsent lourd quand il faut faire le bilan de 2025 et envisager les perspectives de 2026, et notamment la dette des ménages qui est d’une dramatique stabilité (pas comme sa monnaie) entre 88 et 92 % du PIB, ainsi que le retard qui s’accentue dans le domaine des technologies de pointe par rapport à ses voisins, Vietnam, Taïwan, Corée du Sud et le géant chinois.
Bref, pour ne pas reprendre les arguments développés dans l’article, mon sentiment global est en face à un constat alarmant : les décideurs de la classe politique thaïlandaise et les experts économiques et financiers du Royaume font preuve de faiblesses coupables, d’une incompétence chronique et d’un manque de responsabilité décisionnelle par rapport aux défis technologiques majeurs qui seront les moteurs économiques des prochaines décennies, et malheureusement je crains qu’à long terme, Chartchai Parasuk n’ait finalement raison et ne soit pas si loin de la vérité qu’il n’y paraît : la Thaïlande est à minima en perte de vitesse et à la dérive…
Il est temps de revoir sa copie et de juger des compétences concernant les personnes qui détiennent les pouvoirs politique, économique et financier du pays.
Bonjour,
L’article est pertinent sur l’ensemble des sujets abordés.
Les problèmes de fond de l’économie thaïe sont bien cernés.
Un point m’inquiète particulièrement, qui porte sur l’action des banques qui se débarrassent des risques liés à leurs mauvaises créances immobilières.
Par quels moyens le font-elles ?
Le plus connu est leur dilution au moyen de la titrisation de triste mémoire (USA subprimes 2008 MBS et CDO).
Cette pratique leur apporte des liquidités, mais contamine d’autres domaines de la finance qui n’ont certainement pas besoin de cela dans la conjoncture actuelle.
Lorsque le risque de défaut se répand, il devient alors systémique et à la merci de la remontée des taux d’intérêt de la Banque centrale.
Je pense d’ailleurs que c’est la raison principale des récentes baisses de taux qui, selon moi, n’avaient rien à voir avec une volonté d’agir sur le cours du baht.
De récentes restrictions des plafonds de transferts sur les comptes bancaires sont aussi de mauvais augure.
Les banques commerciales s’agitent beaucoup pour conserver des liquidités, ce qui n’est pas dans leurs habitudes quand tout va bien.
Echo
Bonjour, Echo…
Oui, absolument, je vous rejoins et je crains malheureusement que c’est vers ce scénario-là que les banques se dirigent et à un moment donné, il sera trop tard pour redresser la barre…
Quand au bath, il suit la chute des cours de l’or depuis la semaine dernière et se retrouve à nouveau plus près des 37 THB/1 euro que de 38 !!!
Tout cela, comme vous le dites, ne sent pas bon du tout… et comme les instances financières thaïlandaises ne semblent pas être sereines sur les solutions à dispenser…
Se préparer à de nouvelles difficultés économiques, financières et boursières en cette fin d’année et début 2026 ?
Probablement oui, et on se sent bien démuni pour réagir et limiter les dégâts dans notre sphère individuelle.
J’aurais bien aimé avoir la suite.