Pour de nombreux hommes de familles bouddhistes en Thaïlande, l’ordination en tant que moine pour une courte période est un passage obligé.
C’est un peu comme de faire sa première communion pour un catholique ou sa bat-mitsvah pour un juif.
Après avoir obtenu son diplôme universitaire, Palath Dilokloetthanakorn, alors âgé de 22 ans, a fait ce que beaucoup d’autres jeunes Thaïlandais font avant de commencer leur carrière : il est entré dans un monastère bouddhiste.
« C’est une tradition que je devais respecter pour mes parents, surtout en tant que fils aîné », a-t-il expliqué, précisant que ses parents ont été ravis le jour où il a été ordonné.
Peu après la cérémonie de remise des diplômes, Palath a passé un mois dans un temple local.
En Thaïlande, cela est considéré comme un rite de passage, et de nombreux autres hommes choisissent également d’entrer dans un monastère après l’université, lorsqu’ils n’ont pas encore trouvé de travail et qu’ils ont du temps libre.
« C’est une façon de montrer sa gratitude à sa famille pour l’avoir élevé, car on pense que l’ordination confère un grand mérite qui s’étend à ses parents », explique Uthit Siriwan, spécialiste du bouddhisme thaïlandais.
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La vie monastique

Les bouddhistes font acte de respect envers les moines en leurs versants un peu d’eau parfumée sur les mains lors du Songkran. Photo : aleenta.com
Les hommes qui décident d’honorer cette tradition doivent s’installer dans un monastère, se raser la tête et les sourcils et marcher pieds nus dans les rues à l’aube, vêtus d’une robe orange vif, pour recevoir des offrandes de nourriture de la part des habitants des communautés locales.
Les moines qui adhèrent au Theravada, l’école dominante du bouddhisme en Thaïlande, ne peuvent pas cuisiner eux-mêmes.
Ils ne peuvent manger que la nourriture qui leur a été donnée.
Il ne s’agit là que de l’une des 227 règles de conduite strictes qui encadrent la vie d’un moine.
Voir : La vie et l’enseignement du Bouddha Siddharta Gautama
Parmi les autres règles figurent l’abstention de relations sexuelles et l’interdiction de manipuler de l’argent.
Mais, les règles, comme celles à propos de l’argent, ont été allégées dans certaines écoles bouddhistes.
« Ceux qui ont été ordonnés se sont entraînés physiquement et mentalement, ils ont un meilleur sens de l’autodiscipline, de la responsabilité et de la conscience que ceux qui n’ont pas été ordonnés », a déclaré Uthit.
La vie de moine pour « se rafraîchir l’esprit

Moine bouddhiste en méditation.
En racontant son histoire, Palath a admis que le temps qu’il a passé en tant que moine dans sa vingtaine a été essentiellement consacré à aider le monastère plutôt qu’à se concentrer sur les enseignements du bouddhisme.
C’est ce qui l’a conduit à entrer une seconde fois dans le monastère à l’âge de 35 ans.
Car retourner au monastère a ses avantages.
« Beaucoup considèrent l’ordination comme l’un des grands événements de la vie qui ne devrait se produire qu’une seule fois, mais cette valeur est en train de s’estomper », a déclaré Uthit.
Il n’y a pas de durée fixe pour ces ordinations temporaires, elles peuvent être d’une durée d’un jour seulement ou de plusieurs mois.
« De nos jours, être ordonné plusieurs fois, c’est comme suivre un cours pour renforcer et rafraîchir son esprit, et recevoir des encouragements et de l’inspiration », a-t-il ajouté.
Ce sentiment d’enrichissement personnel et spirituel a également été l’une des raisons pour lesquelles Nattapong Chaosangket, 29 ans, a commencé sa vie monastique.
À son âge, l’entrée dans un monastère peut sembler tardive pour beaucoup en Thaïlande, où les hommes sont ordonnés vers l’âge de 20 ans et avant d’être mariés.
Mais il explique qu’il était un « enfant à problèmes » à l’adolescence et au début de la vingtaine, avant de devenir père.
« Si je l’avais fait plus tôt, je serais probablement resté sur mon téléphone toute la journée et je n’aurais rien appris », a déclaré M. Nattapong.
Des Thaïlandais retournent aussi au temple après un coup dur, comme la perte d’un être cher ou une rupture amoureuse, cela aide à se vider l’esprit et renforcer son mental.
Recherche d’expiation ou tentative de dissimulation ?
Tous ceux qui entrent dans la vie monastique ne le font pas pour faire plaisir à leurs parents ou pour des raisons spirituelles ; certains le font pour montrer leur responsabilité morale et expier leurs transgressions.
Le mois dernier, après qu’un exercice d’incendie dans une école de Bangkok a mal tourné, tuant un élève, trois pompiers impliqués ont été ordonnés temporairement pour montrer qu’ils regrettaient l’accident.
Bien que ces hommes aient voulu exprimer leur contrition, Uthit a souligné que certains se réfugient dans la condition de moine et utilisent leur statut pour se protéger des conséquences de leurs actes.
Voir : Pourquoi des Thaïlandais deviennent moines après avoir commis des crimes ?
« La société thaïlandaise considère les monastères comme un lieu de pardon », a déclaré Uthit, ajoutant qu’en séjournant dans un temple, ceux qui ont commis une erreur sont pardonnés par la société.
Plus de 90 % de la population thaïlandaise étant adepte du bouddhisme, les moines de ce pays d’Asie du Sud-Est sont très respectés.
Mais le sentiment public n’est pas toujours en leur faveur, de nombreux Thaïlandais se demandant s’ils éprouvent réellement des remords et s’ils veulent expier leurs actes.
En 2022, par exemple, après l’ordination d’un policier qui avait renversé et tué un médecin avec sa moto, beaucoup ont critiqué l’acte comme un stratagème cynique pour revenir dans les bonnes grâces du public.
D’autres aussi deviennent moines sans véritable motivation spirituelle, par obligation, car ils ont perdu leur travail, leurs logements et cela leur permet d’être nourri et logé.
Et, ce sont souvent les moines de cette catégorie qui ne respectent pas les règles monastiques.
Qu’en est-il des enfants et des femmes ?

Femmes moines, bikkhuni
Si devenir moine à part entière est réservé aux hommes de plus de 20 ans, les hommes de moins de 20 ans peuvent être ordonnés novices bouddhistes.
De nombreuses écoles thaïlandaises organisent souvent une grande cérémonie d’ordination au début des vacances d’été.
Alors que la plupart des enfants ne sont pas très intéressés, Kittiwat Penpato, 11 ans, y a déjà participé et prévoit d’y retourner chaque année, suivant l’exemple donné par son oncle moine.
« Cette année, son école n’a organisé la cérémonie que pendant neuf jours, mais mon fils est resté au temple jusqu’au début du nouveau semestre », a déclaré sa mère, Kancharat Kotsri, ajoutant que Kittiwat envisage de devenir moine à plein temps lorsqu’il sera plus grand.
Les femmes, quant à elles, sont confrontées à une bataille difficile, car elles ne sont pas autorisées à être ordonnées moines en Thaïlande.
Alors qu’il est possible de devenir moine à part entière dans des pays comme la Corée du Sud, la Chine et le Viêt Nam, le clergé thaïlandais ne reconnaît pas les femmes moines ou novices.
Voir : Les moines femmes (bhikkhunis) embarrassent le bouddhisme thaïlandais
En guise d’alternative, certaines femmes bouddhistes dévouées se contentent de devenir des maechi, ou nonnes à robe blanche, qui suivent des règles moins strictes.
Voir aussi :
À faire et ne pas faire lors de la visite d’un temple bouddhiste en Thaïlande
La fusion des croyances religieuses en Thaïlande : bouddhisme, animisme et brahmanisme
Une hot-line pour dénoncer les mauvais moines bouddhistes en Thaïlande
Des moines bouddhistes se bagarrent lors d’un enterrement en Thaïlande
La fortune d’un ancien moine bouddhiste devenu travesti intrigue les Thaïlandais
Source : DW
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