Vivre en Thaïlande en adoptant un mode de vie rural, un choix pas si facile

Un couple mixte a décidé de s’installer sur un terrain dans le nord-est de la Thaïlande pour vivre en autonomie, ils partagent leurs expériences.

Pour Ryan et sa femme thaïlandaise Damo, la pandémie a été le catalyseur d’un changement radical de mode de vie.

Ryan travaillait depuis deux ans dans l’hôtellerie à Bali, en Indonésie, lorsque le Covid-19 a frappé.

Le tourisme s’étant arrêté sur l’île, le couple a décidé de rentrer en Thaïlande pour se rapprocher de sa famille.

Ils se sont rendus dans le village de Damo à Buri Ram, dans le nord-est de la Thaïlande, où la famille de Damo leur avait donné un terrain.

« Nous possédions déjà ce terrain et nous avions prévu de l’aménager pour notre retraite », explique Ryan, 35 ans.

« Mais comme nous avions du temps devant nous, nous avons fini par commencer les travaux pendant le Covid-19.

Le couple et leurs deux jeunes fils, ont demandé à n’être identifié que par leurs prénoms afin de protéger leurs vie privée.

Le couple a fourni une liste de ses dépenses mensuelles, ainsi que tous les coûts liés à la construction de la maison et de sa cuisine extérieure.

Alors que la pandémie s’éternisait, le couple a fini par tomber amoureux du mode de vie rural et a même lancé une chaîne YouTube documentant leur vie à la ferme : Ryan & Mo – Life In Rural Thailand.

Ils ont aujourd’hui plus de 70 400 abonnés.

Le couple a vécu en Thaïlande pendant dix ans avant de s’installer à Bali en raison du travail de Ryan.

Lorsque la pandémie a frappé, ils sont retournés en Thaïlande.

Loin d’utiliser leur chaîne YouTube pour brosser le tableau d’une vie campagnarde romancée, ils parlent ouvertement des difficultés qu’ils rencontrent pour s’adapter à la vie à la campagne.

Ils ont abordé des sujets aussi variés que le coût de la vie et les difficultés de l’agriculture dans leurs vidéos.

Au fur et à mesure que leur audience augmentait, Ryan s’est rendu compte qu’il ne voulait pas retourner à la vie d’entreprise.

« Nous avons vu que nous pouvions faire cela avec un budget limité, en menant un style de vie très simple tout en cultivant notre propre nourriture et en élevant nos propres animaux », a-t-il déclaré.

Première phase : de simples huttes en bambou

La famille vivait auparavant dans une hutte en bambou. Photo : Ryan and Damo.

La famille est arrivée dans le village, qui compte environ 150 habitants, aux premiers jours de la pandémie.

À l’époque, leur parcelle de terre n’était rien d’autre qu’une « grande étendue de boue », explique Ryan.

Face à l’incertitude liée à la pandémie, le couple a décidé de vivre prudemment.

« Nous voulions économiser tout ce que nous avions, car la pandémie aurait pu durer des années, nous ne le savions pas », explique M. Ryan.

Comme ils n’étaient pas prêts à dépenser beaucoup d’argent pour aménager le terrain, ils ont décidé de vivre dans des huttes en bambou.

Des artisans locaux ont construit deux huttes en bambou pour eux.

« Nous avons fait cela pendant environ un an et demi, et nous avons cultivé des légumes ici », explique Ryan.

C’était censé être le plan à long terme, mais les restrictions liées à la pandémie se sont atténuées et le couple a changé d’avis.

« Nous avons décidé d’utiliser nos économies pour investir dans une maison.

Nous voulions construire une maison qui serait utile aux enfants s’il nous arrivait quelque chose », explique Ryan.

Deuxième phase : construction d’une petite maison avec cuisine extérieure

La petite maison achevée. Photo : Ryan and Damo.

Dans un souci de pérennité, le couple a conçu un plan pour une petite maison et une cuisine indépendante.

Ils ont engagé une équipe locale de constructeurs pour donner vie à leur projet.

Ils ont dépensé 821 593 bahts thaïlandais, soit environ 21 263 euros, pour les deux structures.

« J’ai fait des dessins numériques, puis nous avons été sur place tous les jours pour montrer aux constructeurs les détails de l’aspect que nous voulions donner à la maison », explique Ryan.

Il a fallu quelques essais et erreurs pour parvenir à l’agencement final, a-t-il ajouté.

Vue de l’intérieur de la maison. Photo : Ryan and Damo.

Le fruit de leur travail est une maison à deux étages avec un toit orange, un porche abrité et un petit balcon au dernier étage.

À l’intérieur, la maison est aménagée dans un style loft, avec des couleurs neutres et de nombreuses touches de bois.

La cuisine en plein air est une structure de plain-pied séparée de l’habitation principale.

Elle est équipée d’un grand bar et d’un coin salon confortable.

Mais les éléments les plus reconnaissables des deux bâtiments sont les colonnes en rondins qui soutiennent les toits.

« C’était l’idée de ma femme », ajoute Ryan.

« Il faut la traiter contre les termites chaque année, mais nous l’avons tellement aimée.

Nous trouvions que c’était tellement plus joli qu’un poteau carré en béton ».

Troisième phase : penser à l’avenir

Vue avant de la cuisine extérieure. Photo : Ryan and Damo.

Ryan s’est rendu compte qu’à la campagne, certaines personnes transforment leur maison en petite entreprise pour compléter leurs revenus.

Il peut s’agir d’une petite épicerie ou même d’un kiosque vendant de l’essence.

« Cela ne rapporte peut-être pas beaucoup, mais pour un vieux couple, quelques personnes qui entrent dans le magasin tous les jours et qui dépensent, cela leur permet d’avoir un peu de liquidités ».

Cela l’a amené à réfléchir à la manière dont lui et sa femme pourraient utiliser leur maison pour gagner de l’argent.

Et c’est là que la cuisine entre en jeu.

En ajoutant quelques tables et une caisse enregistreuse, ils pourraient facilement la transformer en un petit café.

« Ce n’est qu’une solution de secours », ajoute M. Ryan.

« Si vous vivez dans la campagne thaïlandaise, vous devez réfléchir à la manière de gagner de l’argent, même si ce n’est qu’une petite somme ».

Certaines personnes construisent des maisons avec l’intention de les vendre pour en tirer un bénéfice.

Ce n’est pas le cas de Ryan et Damo.

« Nous savons qu’il s’agit d’une maison pour toujours, quelque chose que nous ne vendrons jamais.

Cela nous permet d’y apporter notre touche personnelle », explique Ryan.

Par exemple, il  décrit le carrelage de son bureau comme ayant un motif « psychédélique » que tout le monde n’apprécierait pas.

Carrelage du bureau avec un motif « psychédélique ». Photo : Ryan and Damo.

Mais, cela n’a pas d’importance puisqu’il n’a pas l’intention de vendre la maison.

« Nous n’avons pas eu à réfléchir à l’impact sur la valeur marchande de la maison », ajoute-t-il.

« Nous avons pu créer ce que nous voulions ».

Pas de loyer, pas d’hypothèque

Le salon. Photo : Ryan and Damo.

En ce qui concerne les coûts, le couple n’a plus de loyer ni d’hypothèque.

Leurs factures mensuelles d’électricité et d’Internet s’élèvent à environ 5 700 bahts, soit 147 euros, selon M. Ryan.

Ils sont raccordés au réseau électrique et disposent également de panneaux solaires.

« Nous avons un onduleur qui prend l’énergie des panneaux solaires et qui complète l’électricité pendant la journée, mais pas pendant la nuit, nous ne la stockons pas dans des batteries », explique Ryan.

« Et pour l’eau, nous la pompons nous-mêmes dans le puits ».

La salle de bain. Photo : Ryan and Damo.

Le couple possède environ 15 hectares de terrain, dont une partie est utilisée pour l’agriculture et l’élevage d’animaux, notamment des poulets, des cochons et des buffles.

« Je veux être en mesure de cultiver notre propre nourriture ou d’avoir des animaux à la ferme pour nous nourrir », a déclaré Ryan.

« Je veux pouvoir faire des économies, produire notre propre électricité et avoir notre propre eau, séparée du réseau ».

Le couple a fait l’école à la maison pour son fils aîné, Otis, jusqu’à l’âge de 4 ans.

Ils prévoient de faire de même pour leur fils cadet, Hugo.

Otis a maintenant 5 ans et Hugo 6 mois.

Moins d’argent, plus de temps ensemble

Le couple a construit un petit jacuzzi. Photo : Ryan and Damo.

Ryan a déclaré qu’il savait que ce mode de vie ne conviendrait pas à tout le monde.

« L’endroit où nous sommes est très isolé.

Nous passons beaucoup de temps en famille, nous sommes dans la nature, mais il y a beaucoup de travail à la ferme.

Il n’est pas facile non plus de s’occuper de tous les animaux », a-t-il déclaré.

Mais pour le couple, le plus grand défi de la vie rurale est de trouver de nouveaux moyens de gagner de l’argent.

« Vous aurez toujours besoin d’argent, même si vous n’êtes pas raccordé au réseau et que vous construisez votre propre maison au milieu de nulle part », explique Ryan.

Selon lui, vivre de la terre est plus difficile qu’il n’y paraît.

« Nous avons essayé d’être autosuffisants à 100 % en produisant notre propre nourriture.

Mais pour nous, personnellement, nous ne pensons pas que ce soit possible ».

Des situations inattendues, telles qu’un essaim d’insectes ou le mauvais temps, peuvent facilement anéantir leurs cultures et réduire leurs efforts à néant.

Selon Ryan, alors que beaucoup d’autres familles pourraient être autosuffisantes à 100 %, ils ont réussi à produire environ 35 % de leur propre nourriture.

Au lieu de cela, ce que le couple faisait, c’était de trouver plein de petites choses qui rapportaient un peu d’argent.

« Nous vendons des cochons vietnamiens ventrus, et ma femme vend du miel en bouteille et des rayons de miel », explique Ryan.

« Nous avons donc toutes ces petites activités qui finissent par soutenir l’ensemble de l’écosystème ».

Ryan a déclaré qu’en fin de compte, ils avaient moins d’argent qu’auparavant.

« Nous ne sommes peut-être pas aussi bien lotis que lorsque je travaillais dans une entreprise, mais nous pouvons être ensemble en tant que famille ».

Et c’est là, ajoute-t-il, l’objectif qu’ils se sont toujours fixés en construisant leur propre ferme et en vivant de manière durable.

Source : Business Insider